DOCUMENTS: Archives du Quai d'Orsay 000039
Abstract
Les deux textes ci-dessous, qui datent de 1956, permettent de comprendre la politique chypriote du gouvernement de Constantin Caramanlis à une époque où la France est confrontée à la guerre d'Algérie et à la crise née de la nationalisation du Canal de Suez par l'Egypte.
Le premier texte, du 8 juin, relate les conversations du ministre grec des Affaires Étrangères, Evanghélos Averof avec Christian Pineau , ancien président du Conseil désigné et ministre des affaires étrangères depuis février 1956 du gouvernement de Guy Mollet. Au cours de ces conversations, auxquelles participent M.Charpentier , l'ambassadeur français en Grèce, E.Averof évoque une solution de la question chypriote dans le cadre de l'OTAN: l'union de Chypre à la Grèce avec des bases britanniques dans l'île, une très large autonomie accordée à la minorité turque et une possible démilitarisation du territoire chypriote pour rassurer la Turquie. C. Pineau propose l'aide de la France pour résoudre le problème de Chypre, qu'accepte E. Averof en suggérant une médiation du président de la République française René Coty.
Le second texte se réfère aux conversations des 14 et 15 septembre du ministre Averof avec Raymond Laporte, directeur du Cabinet du secrétaire d'Etat aux affaires étrangères, Maurice Faure. Ces conversations se déroulent alors que les Français ont envoyé des contingents à Chypre, qui interviendront en novembre à Suez avec des troupes britanniques. S'agissant de la crise avec l'Egypte, Athènes ne peut prendre parti contre ce pays où vivent 120 000 de ses ressortissants. En ce qui concerne Chypre le ministre grec indique à son interlocuteur français l'inquiétude de son gouvernement face à l'agitation de la minorité turque de l'île et à la surenchère de son opposition. La Grèce se contenterait d'une «constitution instaurant une large autonomie et prévoyant une consultation populaire sur le statut futur de l'île, même si la date de cette consultation n'est pas précisée». Prêt à consentir de larges concessions à Ankara, E. Averof va jusqu'à accepter «un échange de populations entre les Grecs du Phanar et toute l'organisation du Patriarcat oecuménique, d'une part, les Turcs de Thrace, d'autre part».